Traditionnellement, compte tenu des aléas maritimes, le transporteur maritime ne s’engage pas sur des délais précis, même si rien ne lui interdit de s’y obliger.

D’une façon générale, le retard à la livraison engage de plein droit la responsabilité du transporteur maritime uniquement si un délai a été prévu à l’avance au contrat et que ce délai figure sur le contrat de transport, connaissement ou autres.

Ce qui signifie que lorsque le connaissement ou autre contrat de transport maritime excluent tout engagement pour le transporteur de livrer à une date déterminée, le réceptionnaire, qui sait que le transporteur maritime ne peut s’engager pour une durée de transport (laquelle est sujette aux aléas de la fortune de mer), n’est pas fondé à engager la responsabilité du transporteur pour les conséquences dommageables résultant du retard à la livraison (CA Aix‐en‐Provence, 27 juin 2019, n° 17/01568).

1 – Il appartiendra au juge de déterminer si les parties sont bien convenues d’une date d’arrivée, auquel cas le délai est impératif.

La question est régie par une jurisprudence abondante et bien établie. Je mentionne quelques exemples, à titre d’illustration, au travers de deux questions : qu’est ce qui est considéré comme date de livraison engageant le transporteur et le délai raisonnable en l’absence de date de livraison au contrat de transport.

L’indication d’une date de livraison

À ce titre, la simple indication d’une date sur une note de chargement, non reprise sur les autres documents, ne constitue pas un engagement ferme du transporteur (CA Paris, 28 mars 2012, n° 09/22569). De même, il a été jugé qu’un délai de 16‐17 jours indiqué par le transporteur maritime dans un courriel n’a pas de caractère contractuel, la durée du transport maritime étant par définition incertaine (CA Aix‐en‐Provence, 29 mai 2019, n° 16/07294).

A contrario, il a ainsi été jugé que, même si la date de livraison, évoquée téléphoniquement puis convenue entre les parties, n’était qu’indicative, cette date faisant partie intégrante d’un contrat, le transporteur doit réparer le préjudice subi en raison du retard (CA Aix‐en‐Provence, 8 juill. 1986, n° 83/5353). Pareillement, il a été jugé que l’indication des dates de départ et d’arrivée, annoncées dans un Télex, « … est nécessairement entrée dans le champ contractuel en ce qu’elle a donné à l’expéditeur et au chargeur l’information de la période possible et de la durée probable du transport » (CA Versailles, 2 avr. 1998, n° 5016/96). De même, un transporteur maritime qui a pris l’engagement d’acheminer la marchandise, dans un délai normal, et a fixé la date d’embarquement a été condamné, car la marchandise a été livrée tardivement en raison de la pratique d’un surbooking (CA Aix‐en‐Provence, 2 déc. 1999, n° 96.433).

Le délai raisonnable

À défaut de toute stipulation contractuelle, il convient de vérifier si le transporteur n’a pas commis de faute qui serait à l’origine du retard et qui, dès lors, engagerait sa responsabilité. Est, excessif, au mois de novembre, un retard de seize jours à l’embarquement de colis contenant des vêtements d’hiver (CA Aix‐en‐Provence, 19 oct. 1988, DMF 1990, p. 39). Un dépassement de 30 à 33 jours n’est pas considéré comme excessif s’agissant de l’acheminement de matériel médical de Rouen à Libreville (Gabon), le navire ayant subi les inconvénients d’une congestion du port pendant plus de 20 jours (CA Lyon, 30 mars 2012, n° 11/00913). N’a pas non plus été considérée comme totalement déraisonnable, les délais donnés par la compagnie étant estimatifs ou indicatifs, la durée de 78 jours pour le transport, de pommes de terre de semence arrivées germées, du Havre à Moroni, aux Comores (CA Douai, 3 déc. 2015, n°14/03789).

Un principe demeure : le transporteur doit refuser la prise en charge des marchandises, s’il ne peut déterminer la durée du voyage ou sait que son navire aura inévitablement du retard (CA Versailles, 2 avr. 1998, n°5016/96).

2 – Il est fréquent de découvrir dans les connaissements une clause déclinant toute responsabilité quant au retard lors de la livraison des marchandises.

La Convention de Bruxelles et la loi française n’interdisant les clauses de non‐responsabilité qu’en matière de pertes ou avaries aux marchandises, de telles clauses appliquées au retard seraient a priori valables.

Il y a donc lieu, pour apprécier la validité d’une telle stipulation, de distinguer les deux conséquences dommageables du retard : soit la perte ou l’avarie de la marchandise, soit les préjudices commerciaux.

Dans la première hypothèse, la clause de non‐responsabilité pour retard n’est pas valable, puisque le transporteur ne peut pas s’exonérer de sa responsabilité pour les pertes ou dommages subies par les marchandises (article L. 5422‐15 du Code des transport et article 3 -8 de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924).

En revanche, dans le second cas, une telle clause n’est pas prohibée. Toutefois, le transporteur maritime sera tenu responsable, malgré l’existence d’une telle clause, en cas de faute inexcusable : selon l’article 3. 2. de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 et de l’article R. 5422‐6 du Code des transports, le transporteur a le devoir d’assurer le transport de façon appropriée et soigneuse.

En application de la Convention et de la loi française, l’indemnisation du préjudice au titre du retard est limitée au montant du fret maritime.

A défaut de stipulation spécifique, il est aussi possible de fonder une demande d’indemnisation sur le droit commun des contrats.

Pour plus d’information, n’hésitez pas à contacter le cabinet.

Patrick VAN CAUWENBERGHE